Compétences et formations

Quelles compétences recherchent les recruteurs de l'ESS ?

Associations, coopératives, entreprises à impact positif, startups sociales... Le secteur de l’ESS réunit un large panel d’entreprises : tous les secteurs d’activité y sont représentés et tous les métiers aussi. Il serait donc délicat, en termes de compétences techniques, de dresser un tableau de celles qui sont les plus recherchées par les recruteurs de l’ESS, car elles sont propres au métier.

En revanche, on a tenté d’approfondir sur ce qui fait la particularité de ce secteur aujourd’hui : les valeurs sur lesquelles il se base pour fonctionner et les savoirs-être qui en découlent.

On te laisse découvrir l'avis de recruteurs et consultants du secteur de l'impact.

DES COMPÉTENCES QUI DÉPENDENT DE LA STRUCTURE

Jean-Christophe est responsable de la plateforme jobs_that_makesense qui recense les offres d’emploi des entreprises à impact et l’ensemble des ressources et formations pour se former à l’impact. Selon lui, qu’on parle d’ESS ou d’entreprises dites “classiques”, il faut d’abord, en tant que candidat, identifier le type de fonctionnement qu’on recherche et les compétences qu’on souhaite exercer et développer pour soi. Une fois ce travail fait, on peut se poser la question des compétences ou postures spécifiques que recherchent les structures qui nous intéressent.

“Les compétences attendues des recruteurs dépendent beaucoup de la structure que tu regardes et de sa capacité à être innovante. Il y a des entreprises classiques innovantes dans leur management et leur organisation et des assos aussi. Mais il y a aussi beaucoup de structures de l’ESS qui sont très old school. C’est au candidat de repérer si iel souhaite rejoindre une structure innovante ou pas. Par exemple, chez makesense, il y a des compétences qui sont très valorisées : la collaboration et les compétences qui en découlent, les compétences liées à la résolution de défis, à la capacité de mobiliser, à l’autonomie, à de l’expertise thématique (tu es un pro de la gestion des déchets par exemple), les compétences liées à la gouvernance partagée et enfin celles liées à la coopétition : comment tu collabores avec des personnes externes. Pour nous, ce sont des compétences importantes.

Ensuite en termes de hard skills, c’est comme pour les entreprises classiques. Si tu n’as pas les compétences liées au secteur, soit tu décides de postuler et tu peux te former sur le tas, soit tu fais une formation dédiée. Les barrières à l'entrée ne sont pas liées au secteur propre de l’impact mais au secteur de l’entreprise ou de la structure elle-même. Aujourd’hui, il y a beaucoup de bilans de compétences ou de formations professionnelles proposées qui te permettent de rattraper ce que ta vie pro d’avant ne t'a pas permis de développer. 

 

Le référentiel de compétences

“On a travaillé sur un référentiel de compétences chez makesense. On s’est posé la question de savoir quelles étaient les spécificités d’un recrutement dans l’impact. Ce qu’il en est ressorti c’est que les recruteurs n’avaient pas d’exigences particulières, si ce n’est, le besoin de ressentir chez le candidat, un profond intérêt, une curiosité pour la mission de la structure. Ça peut passer par retrouver dans le parcours de la personne des actions d’engagements sur la même thématique que celle de la mission d’entreprise.”

L’IMPORTANCE D’UN LEADERSHIP À SOI

Claire Bourrasset, est la fondatrice de ROUj, une entreprise de coaching qui enseigne aux apprenants la réappropriation de leur leadership. Selon elle, “pour répondre aux enjeux sociaux et environnementaux actuels et créer un monde pour tout le monde, il faut être capable d’avoir des leaders connecté.es à leur humanité, à leurs émotions, dans l’acceptation de leur vulnérabilité et donc capable d’empathie, de faire avec les autres, et de faire émerger des leaders autour d’eux/elles”. Pour Claire, le leadership englobe plusieurs compétences :

La conscience de soi

“La première compétence que j’essaie de transmettre et qui me paraît essentielle, c’est la conscience de soi. Il n’y a pas de leadership, sans conscience de soi, de ses émotions, de ses besoins. Sans conscience de soi, on passe notre temps à projeter des choses, à faire souffrir les personnes autour de nous, à nous faire souffrir et à avoir l’impression que ça ne marche pas, car en fait on ne s’écoute pas. C’est aussi la conscience de ses talents : arrêter de s’acharner à être bon dans un truc qui n’est pas notre domaine. Un.e bon.ne leader est là pour développer le potentiel des autres, mais si je ne sais pas développer mon propre potentiel, si je ne suis pas conscient.e de mes forces et faiblesses, si je n’écoute pas mes émotions, je vais avoir du mal à accompagner les autres sur ce chemin.”

L’empathie 

“Pour être capable d’empathie, il faut être capable de vulnérabilité : accepter qu’elles existent et être capable d’en parler. Mais aussi accepter que sa version du monde n’est pas la seule vérité et entendre comme un autre point de vue tout aussi valable que le sien, celui de la personne avec une expérience différente. C’est cette double capacité qui permettra aux leaders de vraiment se connecter aux autres et de pouvoir les accompagner dans leur croissance individuelle.”

La capacité à se positionner

“À poser des limites dans ses relations, dans son travail. Être au clair sur ce qu’on a envie de donner dans sa vie professionnelle : en termes d’horaire, de mission, de valeurs à ne pas transgresser. Comment j’apprends à être au clair sur ce que je veux et à le faire savoir avec justesse ?”

La prise de parole 

“Quand on parle de leadership, pour moi, la prise de parole vient en dernier. c’est tout le reste avant qui est important. Si tu es au clair avec toi-même, avec ce que tu veux incarner et la façon dont tu veux le faire : la prise de parole devient plus simple. On a tendance à se cacher un peu là-dessous j’ai l’impression, mais le travail d’introspection qui permet d’apprendre à se connaître, d'apprendre à se gérer et accompagner avec justesse les autres au quotidien, c’est ça le vrai travail du ou de la leader. L’éloquence c’est super et ça peut être un outil très utile pour fédérer, mais ça ne suffit pas à faire le leadership.”

L’INTELLIGENCE COLLECTIVE & LA COOPÉRATION

Le regard de Claire puis de Jean-Christophe

“Je ne parle pas d’intelligence collective mais d’intelligence de l’autre. Pour moi c’est comprendre que l’autre peut fonctionner différemment, l’accepter, le célébrer. C’est plus facile de travailler avec des personnes qui fonctionnent comme nous, mais c’est moins riche. C’est aussi être capable de cerner les potentiels de chacun et de co-construire quelque chose qui a de l’impact car chacun est dans sa zone d’excellence. Ne pas essayer de forcer quelqu’un à entrer dans une case.”

Claire Bourrasset - ROUj

“Faire œuvre d’intelligence collective dépend beaucoup du collectif. Si le collectif n’écoute pas le ou la stagiaire parce qu'il.elle vient d’arriver, tu n’auras pas d’intelligence collective. Pour moi, ça revient à ne porter aucun jugement de valeur sur ce qui est exprimé par tous et à rebondir sur tout ce que disent les autres. On accepte de se dire que l’intelligence est partout et qu’on accepte de ne pas avoir une intelligence centrale. C’est un système très organique. Peut-être qu’on le retrouve plus dans le secteur de l’impact, mais c’est un postulat que tu peux aussi retrouver dans des entreprises classiques, dans des grands groupes.”

Jean-Christophe - jobs_that_makesense

… Et celui de Cassandre 

Cassandre est la co-fondatrice de Fertiles, un organisme de formation qui accompagne les personnes sur les notions d’engagement et de coopération. Pour Cassandre, l’intelligence de l’autre et la coopération passe d’abord par une compréhension de soi, de sa posture et de son rapport dans un groupe pour ensuite aller vers une compréhension plus large des dynamiques de groupe.

“Le critère auquel je pense quand je suis amenée à engager quelqu’un aujourd'hui c’est : est-ce que la personne a travaillé sa posture de coopération ? Chez Fertiles, on accompagne les apprenants à développer cette compétence, via plusieurs axes :

Comprendre mes propres fonctionnement

Ça va passer par une écoute de moi-même. Pourquoi j’agis ? Quelle est mon intention profonde quand je fais quelque chose ? Qu’est ce qui m’anime et me met en mouvement ?

Comprendre mes blessures

Comprendre ce qui m’active en fonction de mes blessures : qu’est ce qui fait que je suis facilement irrité.e, en colère ou réactif.ve face à quelqu’un ? 

En me comprenant, je vais pouvoir réagir à ce qui m’active. Et en comprenant mes blessures, je peux comprendre que les autres aussi ont des blessures et me mettre plus facilement en empathie avec eux.

Comprendre la notion de culture commune

Dans tous les groupes dans lesquels j'interagis, il y a souvent une culture qui est présente, sauf qu’elle est implicite. Par exemple, si je rejoins une structure dans laquelle peu de cadre a été posé, il y à une culture implicite où l’on se coupe la parole en réunion, les femmes vont parler moins que les hommes, tout le monde peut arriver en retard aux réunions… si l’on plaque les règles de cette organisation sur un mur, ça donne moyennement envie de la rejoindre. Nous on va travailler à révéler l’invisible et poser au centre le fait qu’où qu’on aille il y a une culture. C’est important de la choisir et de la poser. Chez Fertiles, on va apporter un cadre de coopération pour rendre visible des règles communes et et faire en sorte que chacun puisse s’y engager.

  • On travaille beaucoup sur “parler en son je” : dire ce que je ressens, ce que je pense et ne pas plaquer de vérité générale que je plaque sur le groupe. 
  • On va avoir la notion d’écoute, active, curieuse et bienveillante.

On essaie de faire comprendre aux apprenants que où qu’ils aillent il y a une culture qui existe et qu’ils.elles peuvent choisir d’apporter une culture visible, consciente et consentie par l’ensemble du groupe.

Comprendre les dynamiques qui régissent un groupe et les outils qui peuvent venir réguler ces dynamiques

Développer une culture apprenante

Je me mets toujours dans une position d’apprenant.es et de culture du feedback : je donne et reçois des retours des autres.”

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