S'inspirer

Parler d’écologie "sans se sentir jugé" - L’expérience The Week.

En 2019, Hélène Gérin et Frédéric Laloux, l’auteur du célèbre Reinventing Organizations, vivent une prise de conscience écologique grâce à des amis ayant complètement adapté leur mode de vie pour répondre à cet enjeu. “Si nos amis peuvent le faire, on peut le faire”, se disent alors Frédéric et Hélène. Comme leurs amis avant eux, ils se lancent dans la démarche d’aller chercher des informations, de se confronter au sujet et d’en parler autour d’eux. Puis, sentant l’intérêt de leurs proches lors de conversations, ils ont envie de partager cette expérience avec d’autres. Ils imaginent ainsi un format de discussion permettant de se plonger dans les grands défis de notre siècle, d’en prendre la mesure et les impacts, avec ses collègues, ses amis, sa famille… C’est le début de The Week. 

Jonathan, Vanessa et Paul, l’ont tous les 3 vécus au sein d’un ou plusieurs groupes, et reviennent sur leur expérience.

Une expérience facile à organiser.

The Week, c’est 3 sessions d’1h30 à organiser en groupe sur une semaine. À chaque séance, tu visionnes avec ton groupe un film d’1h, spécialement tourné pour l’expérience. Chaque film est suivi de 30 minutes de discussion guidée, pendant lesquelles le maître mot est “pas de jugement”. Très facile d’utilisation, tout le monde peut organiser The Week, accessible sur cette plateforme. Elle peut être faite en visio, ou en présentiel. “Les personnes sont complètement autonomes pour participer à The Week, on leur met seulement un outil à disposition”, explique Bhadraka, gestionnaire du programme The Week en France. Il suffit d’avoir un groupe pour faire les sessions et il n’y a d’ailleurs pas de limite de participants : des groupes de 150 personnes, en entreprise notamment, peuvent la suivre ensemble. Pour bien mener les discussions post-film, des sous-groupes sont toutefois privilégiés. Chez Artengo, la marque de Décathlon pour laquelle Paul travaille, presque tous les collaborateurs ont suivi The Week, et ils étaient “entre 6 et 12 à chaque fois pour suivre les sessions”. Gratuite pour les particuliers, elle est payante pour les professionnels. Elle est enfin traduite en plusieurs langues, puisque disponible en français et en anglais, avec des sous-titres en allemand, espagnol, néerlandais, suédois, polonais et bientôt danois.

Quel futur voulez-vous laisser à vos enfants ? 

C’est ce que vient questionner la première session de The Week. Jonathan, pourtant sensibilisé aux sujets de transition depuis quelques années, en a été “retourné”. “J’étais en télétravail, j’ai fait The Week en visio, et la seule personne avec moi à la maison, c’était ma fille, en vacances scolaires.” Ensemble pour suivre le film, il réalise qu’elle n’aura pas la même qualité de vie que lui aujourd’hui. Dans 20 ans, elle aura son âge et sa vie sera peut-être rythmée de canicules, de guerres, de déplacements qui changeront profondément son mode de vie. Si elle veut avoir un enfant, elle ne pourra peut-être pas, car la pollution impactera sa santé, notamment sa fertilité.“Même si j’ai conscience de la situation dans laquelle on est, j’ai tendance à vivre l’instant présent. Le fait de réaliser que ça va arriver si vite m’a complètement chamboulé.” Lorsque la vidéo se termine et que vient le moment d’échanger avec les autres, il en est incapable. “Je pense que tout le monde était très surpris, je l’ai vécu de manière très forte, en raison de ce contexte dans lequel ma fille était à côté de moi.” Vanessa, également sensibilisée à ces sujets, dit elle aussi avoir eu sa “petite claque” lors de cette première session. Elle qui s’était jusqu’ici “refusée de se projeter dans 20 ou 30 ans”, se laisse prendre au jeu dans le contexte de The Week. “J’ai 3 filles. Le fait de projeter l’âge de ses enfants en 2050, ça fait bizarre.” Paul, responsable du développement durable chez Artengo, à de son côté fait la version prototype de The Week avec ses collègues de travail. Lui et ses collègues ont également été impactés émotionnellement. “Quand tu vois à quoi ressemblera le monde en 2050 et que tu as cette question des enfants, tu te prends une claque de l’espace”, exprime Paul, qui lui n’a pas d’enfant, mais pensait “au petit Jules”, son neveu de 3 ans. “Les enjeux climatiques, on en entend tout le temps parler à la télé, mais “À quoi ressemblera notre vie en 2050 ?” Est-ce que c’est une question qu’on s’est vraiment posée ?” ajoute-t-il.

Pourquoi cette logique du toujours plus ?

Pour la deuxième session, réalisée le jour suivant, Jonathan était cette fois sur son lieu de travail pour suivre la visio-conférence avec son groupe. Son métier consiste à créer et accompagner dans leur développement, des startups issues du monde de la recherche académique.“Cette deuxième session aborde nos modèles linéaires, dans lesquels on est un peu piégé en tant qu’individu” dit-il, et des modèles alternatifs inspirants. “L’optimisme”, c’est le sentiment que retire Jonathan de cette session. Vanessa, qui avait hâte de retrouver le groupe après la bousculade de la première session, a quant à elle vécu la deuxième comme un “atterrissage”. Elle interroge plusieurs choses, comme : “Pourquoi est-on bloqué dans un système destructeur ? Pourquoi n’arrive t’on pas à se mettre en mouvement, alors même qu’on a les yeux dans les phares ?” Elle a aussi apprécié les discussions calmes et posées, qui s’en sont suivies, sans être dans le jugement : “le fait d’atterrir dans un groupe, en confiance, même si je ne les connaissais pas, de parler en son “je” et de ne pas culpabiliser l’autre, c’était bien”. Comme le cadre et les règles sont posés à chaque fois, il y a cette assurance de ne pas avoir “de considérations politiques ou religieuses dans les discussions” précise-t-elle. Pour Paul, ce deuxième jour n’a en revanche pas eu la même résonance : “après le deuxième jour, je suis reparti avec beaucoup de colère, j’ai même eu envie de quitter Décathlon. C’est quand même une grande entreprise présente dans beaucoup de pays et qui pollue. Je me suis dit que j’étais peut-être une pierre de plus à contribuer à cette pollution. Puis, je me suis souvenu des raisons pour lesquelles j’étais chez Décathlon. L’objectif de Décathlon est de rendre le sport accessible au plus grand nombre, et dans le côté environnemental, il y a aussi le côté social : rendre le sport accessible permet aux gens de se retrouver, d’échanger. Compte tenu des engagements sociaux et environnementaux de Deacthlon, je sais que je vais pouvoir contribuer à agir en restant dans cette boîte.'” - Paul 

5 idées d’actions après The Week

Pour la 3ème et dernière session, place à l’action ! Jonathan, Vanessa et Paul ont tous les 3 pris des initiatives, à leur échelle, suite à The Week. En voici quelques exemples : 

#1 Rejoindre des associations.

“Au-delà des moocs, webinaires, je fais des actions un peu plus concrètes désormais : via une association, j’envoie des mails de lobbying à des députés, j’ai aussi manifesté avec Alternatiba.” - Vanessa

#2 Partager l’expérience The Week.

“Mes parents vivent en Guadeloupe et leurs petits enfants vivent en métropole. La fréquence à laquelle ils viennent en France est un sujet de conflit entre nous. J’essaie de leur faire comprendre qu’ils compromettent la santé de leurs petits enfants avec tout le carbone qu’ils envoient dans le ciel. J’essaie de faire passer ce message pas spécialement de manière très adroite. J’ai eu envie de leur faire vivre l’expérience The Week, qui est une approche non culpabilisante.” - Jonathan

“J’ai refait l’expérience avec des amis.” - Paul

#3 Changer des habitudes du quotidien.

“Dans The Week, ils insistent sur le fait de se passer de choses qui ne nous pèsent pas au quotidien. Suite à The Week, j’ai par exemple réduit ma consommation de viande. Je ne suis pas végétarien mais j’ai réduit, et ce n’était pas un effort surhumain pour moi de faire ça.” Je vais aussi quand je le peux, au bureau à vélo. Ça n’a pas changé mon quotidien, je mets autant de temps en voiture et ça me fait prendre l’air le matin, j’arrive même plus éveillé au bureau.” - Paul 

“Ça peut paraître anecdotique mais j’avais un composteur qui dormait dans mon garage et je me suis décidé à le sortir, à le monter et à le remplir. Je suis contente de l’avoir fait car je n’avais pas de raison de le repousser. En plus, c’est une satisfaction de voir sa poubelle qui descend et qui va repartir pour faire quelque chose de plus utile.” - Vanessa 

#4 Ne pas seulement dire. Faire.

Pour Vanessa, “la preuve par l’exemple est toujours bonne conseillère. En se mettant en marche, les autres suivront.” Elle reprend pour illustrer ces propos l’exemple du Dancing Guy, qu’on aime bien chez makesense ! Pour elle, The Week peut permettre ce mouvement, “en étant individuellement acteur.ice, on peut multiplier les personnes qui se mobilisent.”

#5 Se reconvertir dans un métier à impact

Parmi les actions possibles, changer ses pratiques dans son travail, voire changer de métier sont aussi des moyens pour s’impliquer dans la transition écologique et sociale. Parmi les 3 interviewés, Vanessa auparavant responsable développement en design de marque, avait fait une reconversion professionnelle pour orienter son métier vers la transition avant l’expérience The Week. Aujourd’hui, elle réalise des missions de conseil et développement commercial sur les sujets de transition durable, pour les organisations. C’est d’ailleurs via son nouveau travail qu’elle a découvert l’initiative. Elle raconte : “En 2019, quand la loi Pacte est arrivée, je me suis posée la question du rôle des entreprises pour la transition dans notre société. Ça a planté sa petite graine qui a mûri en 2020, quand j’ai fait un bilan de compétences, et jusqu'à la fin 2021, lorsque je suis partie de ma boîte pour me reconvertir et accompagner la transition durable des organisations. J’ai fait une formation avec Ecolearn sur les fondamentaux de l’entreprise durable et une autre avec Lumia sur les changements de modèles organisationnels et civilisationnels. Depuis 2 ans, je me suis aussi engagée bénévolement en devenant animatrice de la Fresque du Climat et animatrice du Match du siècle avec Ticket for Change. J’ai construit ma transition en ayant ce mixe d’apport théorique et d’expériences concrètes. J’ai aussi fait quelques missions en freelance pour travailler sur la labellisation RSE d’entreprises ou encore sur les modèles de l’économie régénérative. Plus dernièrement, j’étais chez makesense, pendant 5 mois en tant que responsable des partenariats en lien avec la transition des organisations. C’est là que j’ai entendu parler de The Week.” Ayant décidé de s'engager professionnellement pour la transition, Vanessa prévoit d’utiliser The Week régulièrement, l’approche étant puissante et complémentaire aux formations qu’elle a déjà suivies.

Un dernier mot sur The Week ? 

“En suivant The Week, j’ai pris beaucoup de recul par rapport à mes soucis personnels, peu importants finalement face à ces enjeux.”

Jonathan

“Ce qui m’a marqué est la diversité des personnages : jeunes, âgés, en ville, à la campagne… Tu peux t’identifier à l’un ou à l’autre. Puis, quand Hélène et Frédéric s'adressent à toi, ils sont chez eux. Un vrai cocon est créé malgré la brutalité des informations que tu reçois. ” 

Vanessa

“Le faire en présentiel à ses avantages. Comme on travaille tous ensemble au même endroit, échanger le midi ensemble et après les sessions a beaucoup aidé. Beaucoup sont par exemple venus me voir à la fin de la première journée pour me partager leurs émotions.”

Paul

Pour organiser une session, comment je m’y prends ?

Le cœur de l’expérience est d’avoir cette conversation avec ses proches. Il faut pour cela : 

#1  Trouver des personnes avec qui la faire : être au moins 4 ou 5.

#2 Trouver 3 dates : 3 fois 1h30 idéalement sur une semaine, les soirs ou pendant la pause déjeuner. 

#3 Aller sur le site pour inscrire son groupe. Le déroulé de la première session et le film sont ensuite accessibles sur la page. 

#4 Une fois le jour 1 terminé, il suffit de reproduire la même démarche en poursuivant avec le jour 2…

Les outils nécessaires : si The Week est suivie en présentiel, il est nécessaire d’avoir un ordinateur ou une télévision pour lancer le film. Si elle est suivie en ligne, il faut activer un partage d’écran. 

💡 Le conseil de Bhadraka : laisser minimum une nuit et maximum 3 jours entre chaque session ! L’expérience ne fonctionne pas bien si on fait plusieurs sessions dans la même journée.

Et la suite ?

Tu peux organiser facilement une prochaine session ICI.

Pour aller plus loin

👉 Printemps pour la planète, 1000 idées pour se bouger

👉 Les collectifs, une arme de destruction massive ? 

👉Prendre le temps de se poser pour repenser son impact au travail

👉 Le guide de la reconversion vers l’impact

Pour passer à l’action

👉 Tu peux faire tes premiers pas en tant que bénévole avec Ré_action

👉 Si comme Vanessa, tu souhaites faire une reconversion professionnelle en commençant par un bilan de compétences, voici nos organismes de bilans partenaires.

👉 Suivre une formation dans le domaine de l’impact

👉 Trouver un emploi dans une structure de l’impact