Faciliter l’intelligence collective dans les organisations
Qu'elles soient déjà motrices de la transition écologique et sociale, qu’elles amorcent la transition ou qu'elles l'envisagent, les organisations doivent fonctionner en intelligence collective. Telles des écosystèmes composées de nombreux individus, aux compétences, aux connaissances et aux motivations variées, les organisations sont en effet propices aux synergies pouvant mener à de grands changements. Mais encore faut-il que tous les potentiels puissent exister et s’exprimer. Créer une intelligence collective est justement le fait de permettre à chacun d’exprimer son plein potentiel au service d’un projet commun et d’améliorer ainsi la performance globale d’une organisation. Il existe une diversité d’outils pour faciliter l’intelligence collective. Charles, fondateur de l'organisme de formation I&CC (Intelligence & Création Collective) nous en présente quelques-uns dans cet interview.
Charles Fontaine - Co-fondateur d'I&CC
Quel est ton parcours Charles ?
J’ai fait une licence de mathématiques appliquées aux sciences sociales à Dauphine. Puis en 2006, les premiers Master en Développement Durable sont arrivés dans l’école. J’ai alors bifurqué vers cette formation, portant déjà un fort intérêt pour l’aspect transversal dans les disciplines et sensible au sujet du développement durable. Avec une trentaine de profils très variés dans le Master, cela rendait l’apprentissage vraiment intéressant. Après mon Master, je me suis retrouvé à la Direction Générale du Développement Durable de la Société Générale. Puis, je suis parti vivre à Bordeaux et j’ai eu l’opportunité de travailler sur la partie environnementale du chantier d’un Ehpad. Ce chantier m’a donné envie de monter ma boîte dans le conseil en développement durable. Après cette expérience de 5 ans, je suis parti faire un tour de France des Éco-Lieux pour créer un guide des retours d’expérience de ce type de mode de vie. Puis avec un ami, nous nous sommes vus proposer le développement d’un lieu, un projet qui ne s’est pas concrétisé la première fois en raison de désaccord avec le propriétaire. Mais j’ai quand même monté un écovillage dans le Nord de l’Aude par la suite. Il nous a fallu 1 an pour trouver les personnes intéressées à rejoindre le projet et 1 an pour trouver le lieu. Sur le lieu, nous nous étions beaucoup formés sur des outils de gouvernance, de résolution de conflits, d’intelligence collective… Nous organisions des stages sur place pour se rémunérer. Puis, nous avons mis fin à l’expérience d’un commun accord. De là, avec ma compagne Aline, nous avons lancé notre entreprise d’intelligence collective. Je me suis formé à l’école de Robert Dilts, spécialiste en PNL et Aline s’est formée au Théâtre Forum et au coaching relationnel. Nous avons monté l'organisme de formation I&CC en 2018.
Aline Johnston - Co-fondatrice d'I&CC
Depuis, que s’est il passé ? Comment a évolué l’organisme ?
Nous avons un volet formation avec lequel nous formons les personnes à notre métier. La première année, nous avons organisé uniquement des cycles de 1 à 3 jours pour enseigner les prérequis pour acquérir une posture individuelle au service du collectif. Puis, nous avons créé les modules 2 et 3 sur 6 jours supplémentaires.
Les 3 premiers jours concernent tous les outils relationnels : CNV, écoute active, coopération, intelligence collective. Les 3 jours suivants, nous apprenons le design, les outils et la création de l’intervention. Ensuite, les apprenants ont une pause de 2 à 3 mois pendant laquelle ils doivent réaliser une intervention, faire un rapport et concevoir un outil. Les 3 derniers jours consistent à faire une restitution de l’intervention et des outils utilisés au groupe.
Nous souhaitons que nos stagiaires s’approprient la facilitation à leur façon, selon l’utilisation qu’ils souhaitent en faire par la suite. C’est pour cela que la spécificité de notre formation est que les personnes qui se forment avec nous apprennent, en plus des outils déjà connus, à créer leurs propres outils d’intelligence collective. L’innovation continue est très importante dans ce métier pour être au plus proche des besoins et pour ne jamais s’ennuyer en se servant toujours des mêmes outils (world café, speedboat…) et prendre le risque de vider la démarche de son sens.
Devenir facilitateur c’est aussi devenir ambassadeur auprès des organisations au fonctionnement encore “conventionnel” de l’importance de la mutation vers un fonctionnement “organique”. Et s’il y a une fenêtre pour le prouver, il faut être prêt et percutant !
Quelles personnes font appel à vous pour se former ?
À l’origine, nous visions les managers. Et en réalité, les besoins viennent de toute une partie de professionnels à qui on a demandé d’avoir cette casquette de facilitateur en intelligence collective en plus. 60% de personnes sont issues du coaching d’entreprise et de la qualité de vie au travail et les autres sont des consultants qui intègrent l’intelligence collective à leur métier.
Quels ponts as-tu pu créer entre tes précédents métiers et celui-ci ?
Le métier de consultant me sert pour comprendre les besoins, poser le diagnostic dans les organisations et pour concevoir une ingénierie de formation adaptée aux besoins. Je reste aussi dans des sujets qui ont du sens en cherchant à incarner certaines valeurs dans les entreprises.
Formations et différents ateliers animés par I&CC
En quoi vous vous différenciez par rapport aux autres ?
Via nos ateliers. Nous faisons des formations de Clowns dans les organisations. Quand on parle de “Clown”, c’est sous le prisme de l’authenticité et de la légèreté allier à la profondeur de la communication que représente ce personnage. Il consiste à être 100% soi-même, sans jouer un rôle. Nous avons aussi développé l’atelier Chaos Fertile, un jeu de société pour créer des coopérations. Il permet de partir d’une thématique projet, de poser les idées et les rêves de chacun et d’amorcer des plans d’actions via la méthode des petits pas.
Quels ont été les ateliers qui t'ont marqués ? Tes succès ?
Souvent, le plus impactant dans ce métier est d’avoir créé un espace permettant à des personnes d’exprimer ce qu’elles n’ont jamais exprimé au sein des organisations. Je me suis d’ailleurs formé aux “rituels en organisation” pour ritualiser les changements et les inscrire dans le temps. Bien sûr, il faut être lucide, ce n’est pas en 2 jours qu’on va transformer les organisations, mais nous plantons des graines ! Un beau souvenir qui me vient, est celui des 20 ans de l’Alpa, une association d’aide au logement. Nous avons animé des ateliers de prise de parole en public via la construction de petites scènes en Théâtre Forum. Des personnes qui n’avaient jamais pris la parole en public se sont alors mises à jouer des scènes en totale improvisation et ça a été un très beau moment.