La vie dans un écovillage : immersion à Pourgues
L’écovillage de Pourgues, en Ariège
À l'écovillage de Pourgues, tu peux te former à la vie en collectif et à l’éducation démocratique via des stages et des séjours immersifs. Pour Marjorie, qui a d’abord fondé une école démocratique, créer un écovillage était la suite logique pour construire une vie plus alignée avec ses valeurs, proche de la nature, dans des relations saines et constructives avec les autres êtres-humains. Avec une trentaine de personnes ayant toutes leurs propres expériences et compétences, ils ont co-construit ce lieu autour de valeurs communes et font partager leur mode de vie à tous visiteurs curieux de vivre une expérience immersive, tel un habitant de l'Écovillage de Pourgues. Comment se déroule la vie dans l’écovillage ? Que peut-on y apprendre ? Marjorie nous en dit plus. !
D’où t’es venue cette idée de lancer un écovillage Marjorie ?
J’ai travaillé avec les enfants dans le périscolaire, puis en tant qu’enseignante. Très vite, j’ai ressenti une crise de sens profonde : pourquoi ce rythme ? Ces programmes ? Cette autorité ? Pourquoi s’évalue-t’on à ce point ? Pourquoi sommes-nous hors sol ? En tant qu'enseignants, nous étions tous embarqués dans ce système sans comprendre vraiment pourquoi. J’ai alors essayé de faire changer ce système de l’intérieur mais la structure étant très ferme, peu de marges de manœuvre étaient possibles pour changer les choses. En tirant le fil, j'ai compris que je faisais une remise en question de la société dans son ensemble, notamment du système méritocratique. Puis, j’ai découvert les écoles Sudbury, des écoles démocratiques dans lesquelles les élèves ont autant de droits que les adultes. J’étais fascinée de voir l’organisation de ces écoles et surtout d’entendre les témoignages de leurs élèves, qui, je trouve, étaient d’une grande maturité.
J’ai ensuite démissionné de l’Education Nationale pour participer à la création de “L’école dynamique”, la première école Sudbury en France, dont le modèle n'existait alors qu’aux États-Unis et en Europe. Dans cette école, on décloisonne tout, il n’y a plus de salles de classes par tranche d’âge, d’enseignement systématique, de programmes et d’emploi du temps prédéfinis. Nous sommes dans un lieu démocratique où tous les enfants sont mélangés de 4 ans à 19 ans et ont un pouvoir égal quelque soit leur âge. Nous partons du principe que les apprentissages se font par motivation intrinsèque dans un milieu multi-âge et démocratique où les univers se côtoient sans limite avec un cadre strict sur les règles du vivre ensemble. Les adultes sont présents pour encadrer et accompagner ce qui émerge. Nous étions 6 adultes à créer l’entreprise et, pour collaborer ensemble, nous nous sommes inspirés de Frédéric Laloux, qui prônent des organisations avec moins de hiérarchie et une gouvernance partagée. Ensuite de nombreuses personnes se sont intéressées au projet et une vingtaine d'écoles de ce genre sont nées.
“Pourquoi s’arrêter à ça ?” nous sommes-nous dit avec mon compagnon Ramïn et un ami, Yohan. Vivant cette double aventure entrepreneuriale et éducative, nous avons eu envie de créer un lieu de vie dans lequel il y aurait deux paradigmes : l’éducation démocratique et la gouvernance partagée.
Comment s’est passée la création de l'écovillage ?
Lorsque nous nous sommes dit oui tous les 3, nous avons posté sur les réseaux sociaux : “Après l’école dynamique, nous voulons lancé le village dynamique, qui est partant ?” Et une trentaine de personnes se sont montrées partantes. Nous les avons alors rencontrées puis nous nous sommes vues une fois par mois pour poser les bases de notre projet et identifier les personnes motivées pour incarner les valeurs de liberté et de responsabilité qui constituaient la colonne vertébrale du projet.. Au bout de 2 à 3 mois, nous nous sommes partagés des rôles, notamment celui de trouver et visiter des lieux. Le premier que nous avons visité était “Pourgues” et il nous a immédiatement séduit. Nous nous sommes alors réunis avec tout un groupe sur le lieu et avons posé un acte symbolique : “tous ceux qui disent oui, signe sur ce papier !” Ceux qui étaient les plus motivés ont signé. Ensuite, nous avons ouvert le compte en banque et chacun a pu participer financièrement librement et sans attente. Nous avons réussi à récolter 960 000€ au total notamment grâce à une très grosse contribution d’un des fondateurs et à un prêt du vendeur. Nous avions peu à ajouter ensuite, l’investissement total étant de 1 million d’euros.
Une fois que vous avez eu le lieu, comment s’est déroulé la première année ?
La première année, nous avons créé le collectif de vie. Nous avons cherché à savoir comment nous allions vivre et fonctionner ensemble. Nous avons pour cela repris les outils de l’Ecole Dynamique pour établir les règles communes avec un Conseil de village hebdomadaire, puis nous avons intégré d’autres outils afin de répondre aux besoins qui émergeaient au fur et à mesure notamment sur la régulation des conflits. Nous vivions grâce à nos économies, le chômage et d’autres ressources financières cette première année. Puis nous avons eu envie de nous ouvrir et de faire découvrir notre mode de vie les formations et les séjours vacances ont commencé à partir de la deuxième année.
Quelles sont les formations et séjours proposés ?
L’idée est que chaque villageois propose des formules d’accueil autour de ses compétences et appétences. Nous organisons par exemple des formations autour de l’éducation démocratique, sur la vie en collectif. ou encore la transformation personnelle. On propose aussi des séjours en immersion sur le thème de l’autoconstruction, du bien-être et du yoga.
Que viennent chercher les visiteurs qui se forment dans votre écovillage ?
Une autre manière de vivre, un autre système éducatif pour leurs enfants, pour l’écologie humaine. Elles souhaitent voir comment nous vivons en groupe, la manière dont nous nous disons les choses, comment nous transformons nos conflits. Elles veulent aussi passer un temps dans un endroit paradisiaque, sur une colline, vue sur les Pyrénées, avec cinquante hectares de verdure, des potagers, un jardin d’enfant et piscine…
Quels sont les retours des personnes qui ont suivi vos formations ?
Il y a des personnes qui ont réaménagé leur vie avec leurs enfants, qui les ont même sorties de l’école traditionnelle. Certaines ont créé des collectifs, ont intégré nos outils de restauration du conflit dans leur famille ou dans leur entreprise. Je pense à une personne en particulier qui a intégré la “sollicitation d’avis” dans son entreprise pour donner plus de pouvoir de décision et d’action aux équipes et ainsi déléguer son pouvoir en tant que manager .
Quelle est ton expérience de cette vie en collectivité ?
C’est une expérience extraordinaire, transformatrice. Parfois c’est dur, notamment sur le plan humain, parce que nous n’avons pas appris à être aussi humain. Nous avons appris à respecter des consignes, à obéir et fonctionner, et non à faire avec l’autre, avec les besoins et limites de chacun, tout en ayant des contraintes administratives, législatives et économiques. C’est un peu la vraie vie ! Nous sommes confrontés au réel tel qu’il est, complexe et changeant C’est transformateur, car ça demande d’aller chercher des ressources internes, de bien se connaître,et d’écouter ses limites. D’être capable aussi de se créer un équilibre entre sa bulle personnelle, familiale, le collectif et les associés que nous sommes.
Quels sont les futurs projets de l'écovillage ?
Un renouveau humain s’annonce : certaines personnes partent du collectif explorer d’autres horizons, d’autres s’installent et apportent un vent frais au projet et au groupe. En termes de nouveaux projets, nous allons avoir une ferme pédagogique et un café associatif. Nous avons aussi un projet de recréer un écosystème sur nos collines asséchée par la monoculture en créant notamment une mare et une forêt nourricière. Et enfin, nous souhaitons, dans deux ans, ouvrir un centre de yoga.
Pour en savoir plus
👉 Voici les formations de l’écovillage de Pourgues